Si une personne a subi un épisode de dépression majeure, quelles sont les chances pour qu’elle en traverse un deuxième?
Statistiquement, il y a plus de chance qu'elle subisse une seconde dépression car elle pourrait être biologiquement prédisposée. Ce peut aussi être une personne qui est dur envers elle-même, qui est très exigeante, et qui risque donc de subir une dépression. Mais si cette personne comprend les facteurs qui ont contribué à sa dépression, elle peut tenter de les modifier et prévenir la survenue d’un autre épisode. Sans changement cependant, elle sera toujours susceptible d’être déprimé à nouveau.
-Camillo Zacchia, Ph.D., École Mini Psy 2009
Le fait de dormir beaucoup est-il un indicateur de dépression?
Dormir beaucoup peut indiquer une dépression. Mais, cela peut aussi indiquer une anémie ou un problème physique quelconque. Voilà pourquoi vous devez, selon moi, être correctement évalué. Une bonne évaluation comprend une évaluation psychologique et une évaluation physique. En tant que psychologue, je ne peux pas soumettre les gens à un examen sanguin; je n’ai aucune connaissance en médecine. En revanche, si je demande à un patient s’il a consulté son médecin récemment et qu’il me répond qu’il l'a vu le mois dernier, qu’il a fait des examens sanguins et que tout était normal, je sais alors que le problème n’est probablement pas physique.
Ce qu’il faut donc chercher avant tout à savoir est si cela est inhabituel. Certaines personnes dorment beaucoup. Certaines ont besoin de dormir dix heures par nuit pour fonctionner. Elles l’ont toujours fait et ce n’est pas un problème. Si une personne fonctionne normalement avec sept ou huit heures de sommeil mais que, dernièrement, elle est constamment fatiguée et a besoin de dormir davantage, c’est que quelque chose s’est produit. Il s’agit de savoir si ce changement est physique ou psychologique. Évidemment, si elle me dit qu’elle a perdu son travail et qu’elle a été incapable de sortir du lit depuis, il y a des chances que la cause soit psychologique. Mais une évaluation correcte est tout de même nécessaire pour le vérifier.
-Camillo Zacchia, Ph.D., École Mini Psy 2009
Si la dépression est une tristesse extrême, une joie extrême peut-elle être considérée comme une maladie mentale?
La joie pure n’est pas une maladie. Mais si vous êtes démesurément optimiste, il se peut que vous ne soyez pas protégé lorsque vous rencontrerez une menace. Cela étant dit, il y a aussi la manie qui est très différente. Je ne sais pas à quoi vous faites référence, mais dans les cas de troubles bipolaires, certaines personnes présentent des changements d’humeur importants : une personne peut traverser un épisode dépressif qui n'aura généralement aucun lien avec les circonstances – il sera plutôt d’origine biologique – ou une phase d’exaltation qui n’est pas seulement une sensation de bien-être mais une manie ou une hypomanie. Dans une telle situation, on déborde d’énergie; on peut dormir une heure pendant la nuit et se sentir parfaitement reposé. Certains auteurs ont écrit des ouvrages entiers en une fin de semaine d’exaltation maniaque, d’autres personnes ont créé leur entreprise, etc. Et lorsque la situation devient plus extrême, certaines personnes peuvent traverser un épisode psychotique. Elles peuvent éprouver ce que l’on appelle de la mégalomanie: se prendre pour Dieu et se sentir toutes puissantes. Quelqu’un m’a dit un jour : «Je suis rentré chez moi en voiture à 3h du matin et j’ai brûlé tous les feux rouges parce que je savais que je pouvais contrôler la circulation». Cet homme se prenait pour Dieu et testait ses pouvoirs en brûlant tous les feux rouges simplement pour se le prouver. Heureusement, il était 3h du matin, mais il aurait probablement pu se tuer. Je me suis assuré que sa famille obtienne une ordonnance du tribunal afin de le faire hospitaliser parce que son état était grave.
-Camillo Zacchia, Ph.D., École Mini Psy 2009
Une personne qui reçoit un diagnostic de dépression clinique a-t-elle plus de risque d'être déprimée toute sa vie?
J’aimerais vous répondre non même s’il ne survient rarement qu’un seul épisode de dépression. Si c’est une question de personnalité, une façon de voir les choses, si vous êtes vraiment dur avec vous-même, alors vous aurez tendance à y être prédisposé. Les circonstances peuvent changer et, de temps à autres, devenir plus difficiles. Par conséquent, si vous comprenez réellement pourquoi vous êtes si dur avec vous-même et que vous procédez à des changements fondamentaux, alors vous serez protégé. Si, d’un autre côté, vous passez à travers la dépression mais que rien ne change vraiment, vous devenez alors plus vulnérable. Les chercheurs ont tendance à démontrer que la dépression devient de plus en plus probable, mais selon moi, c’est parce que nos expériences continuent d’affecter notre confiance, et si celle-ci est atteinte à chaque situation de conflit, il est plus probable que l’on réagisse mal dans les situations à venir.
Cela étant dit, je suis fondamentalement convaincu que vous pourrez faire changer les choses si vous prenez réellement le temps de comprendre ce qui se passe. La thérapie cognitivo-comportemental (TCC) consiste entre autre à pousser les patients à remettre en question leurs comportements et leurs perceptions, à prendre conscience de leurs préjugés et de la façon dont ceux-ci affectent leurs propres expériences. Ceci étant dit, il existe, pour les personnes qui ont tendance à sombrer sans cesse dans la dépression, ce que l’on appelle les thérapies fondées sur «l’acceptation» ou «la pleine conscience». Comme le dit le vieil adage : «Change ce que tu peux et accepte ce que tu ne peux changer». Évidemment, le but de la thérapie est de changer notre façon de voir les choses et, ainsi, de modifier les circonstances dans lesquelles nous vivons. Mais nous devons parfois simplement accepter ce que nous sommes et les circonstances dans lesquelles nous vivons. Les personnes qui présentent des symptômes récurrents doivent vraiment apprendre à lâcher du lest. Si vous y parvenez, vous êtes alors plus à l’abri d’une dépression.
-Camillo Zacchia, École Mini Psy 2009
Quelles sont les causes de la dépression ?
Les causes de la dépression comprennent les facteurs biologiques, ce qui signifie que d’autres membres de la famille présentent le même type de difficultés. Cette composante génétique rend les sujets plus susceptibles à la dépression, bien que ce ne soit pas un lot inévitable. Habituellement, ces personnes sont plus vulnérables face à certains événements de la vie (particulièrement les événements se produisant tôt dans la vie). Par conséquent, selon vos antécédents familiaux et votre tempérament, vous pouvez à un moment donné souffrir de dépression.
- Johanne Renaud, M.D., École Mini Psy 2010
J’ai entendu dire que la dépression est un problème hormonal et non médical. Est-ce vrai ou faux?
La dépression peut être d’origine hormonale ; dans ce cas, elle est considérée comme l’un des troubles de l’axe III. Ce n’est pas une véritable dépression clinique telle que les cas de l’axe I, mais elle peut être exactement identique. Par exemple, la dépression post-partum est clairement d’origine hormonale.
-Joseph Rochford, Ph.D., École Mini Psy 2009
Les patients hospitalisés pour dépression sont-ils évalués pour déterminer le risque de suicide?
La dépression est le principal facteur de risque du suicide, mais toutes les personnes dépressives n’ont pas nécessairement des pensées suicidaires. Bien qu’aucune évaluation prédictive ne soit à notre disposition, nous pouvons évaluer certains facteurs de risque. Néanmoins, l’évaluation du risque de suicide est encore très difficile.
- Johanne Renaud, M.D., École Mini Psy 2010
La dépression est-elle génétique ?
Habituellement, si un parent souffre de dépression, ses descendants ont 3 à 5 fois plus de risques d'y être également sujets. La composante génétique de la dépression est relativement complexe; il en existe plusieurs types. Cette hétérogénéité signifie que tout le monde y est plus ou moins exposé.
-Johanne Renaud, M.D., École Mini-Psy 2012
Qu'est-ce qu'un comportement normal? Est-il normal d'être parfois déprimé pour de courtes périodes?
Quand j'étais jeune, je détestais le mois de septembre parce qu'il signifiait mon retour à l'école, c'est-à-dire la fin de l'été! Il est certain qu'il peut y avoir plus de dépressions quand les jours raccourcissent et qu'il y a moins de lumière. Cet effet peut être particulièrement marqué pour les gens du Grand Nord, où l'ensoleillement se réduit à deux ou trois heures par jour durant les mois d'hiver. De plus, le refroidissement s'accompagne souvent d'une baisse de notre activité physique, ce qui peut affecter notre humeur.
La dépression peut surgir et disparaître. Nous n'en connaissons pas toujours clairement la cause. Parfois, c'est simplement de l'épuisement normal. Il peut aussi s'agir d'événements récurrents qui nous rendent un peu plus déprimés: des échéances, des examens, des rapports annuels, le genre d'événements qui revient périodiquement. De plus, si quelqu'un de particulièrement important pour nous est décédé à un certain moment de l'année, le retour de cette saison le rappellera à notre souvenir.
Il est difficile de distinguer ce qui est normal de ce qui ne l'est pas, vu la diversité des réactions humaines et une foule de facteurs dont nous ne sommes pas conscients. Mais un des critères qui guident les professionnels est la question suivante: Comment cela vous affecte-t-il? Cela vous empêche-t-il de vous rendre au travail? De sortir de la maison? Lorsque ces émotions commencent à affecter votre fonctionnement quotidien, elles deviennent moins normales. C'est une façon d'évaluer si la situation dégénère un peu trop.
-Camillo Zacchia, École Mini Psy 2007
Quel est le délai normal avant de pouvoir diagnostiquer une dépression?
Si une personne est déprimée pendant cinq mois et n’est pas en mesure de fonctionner, diriez-vous qu’il n’est pas utile de la traiter avant le sixième mois? C’est une décision arbitraire. Nous établissons simplement un délai pour écarter les épisodes très brefs liés à une circonstance, à de mauvaises nouvelles, etc. Si vous perdez votre emploi, vous serez déprimé, mais on ne vous traitera pas immédiatement sauf si vous restez déprimé longtemps. Selon moi, plus la période est longue, plus elle est révélatrice d’un problème. Si vous êtes déprimé à cause de la perte d’un être cher, je ne m’attends pas à ce que vous vous sentiez mieux après deux semaines. Qu’est-ce qu’une période normale de deuil? Serait-ce six mois? Deux ans? Certaines personnes fonctionnent relativement bien après un mois ou deux mais d’autres ont besoin de plus longtemps. Ce qui importe pour vous est votre état. Et si vous vous sentez mal, vous devriez alors envisager d’obtenir de l’aide.
-Camillo Zacchia, Ph.D., École Mini Psy 2009