Existe-t-il une relation entre les troubles de l'alimentation et le trouble de la personnalité limite?
Un trouble de la personnalité est dit «limite» parce que les personnes qui souffrent de ce syndrome présentent un déséquilibre marqué. Elles sont très impulsives, d’humeur changeante et parfois chaotique. Elles peuvent aimer quelqu’un, puis éprouver une rage folle vis-à-vis de la même personne la minute qui suit. Elles peuvent aussi ressentir des changements très importants dans l'image qu'elles ont d'elles-mêmes, passant d'un réel bien-être à des comportements suicidaires en un instant. Ce sont des personnes très instables. Et l’une des causes de cette instabilité est, évidemment, l’image qu’elles ont d’elles-mêmes. La sérotonine ayant également un effet sur le comportement, elle peut donc être liée à l’instabilité de certaines personnes. Si vous souffrez d’un trouble de personnalité limite, il est fort possible que vous souffriez d’hyperphagie. On constate, par conséquent, que nombreuses sont les personnes boulimiques susceptibles de présenter également ce type de trouble. Mais cela n’est pas une règle générale; toutes les personnes souffrant de boulimie ne présenteront pas obligatoirement un trouble de la personnalité limite.
-Howard Steiger, Ph. D., École Mini Psy 2009
Quels sont les signes à surveiller pour détecter un trouble de l’alimentation?
Il en existe plusieurs. Le plus évident est que, dans les cas d’anorexie, les gens deviennent très minces, si minces que vous vous dites que ce n’est pas normal et que vous réalisez qu’il se passe quelque chose. Ils peuvent, en outre, éviter l’heure des repas ou se montrer anxieux à l’égard de tout ce qui touche à l’alimentation. Ils peuvent être incapables de goûter des plats inhabituels tout en réduisant graduellement le nombreux de ceux qu’ils considèrent «sans danger».
Il est possible que vous vous aperceviez qu’ils se font vomir en cachette ou que des laxatifs disparaissent. Nous constatons, chez ces personnes, une tendance à faire de l'exercice physique après les repas. Elles peuvent également présenter des troubles de l’humeur; elles peuvent devenir très instables à ce niveau, avoir du mal à dormir ou éprouver des difficultés à se concentrer. Ces signes sont complexes à déceler parce que les changements comportementaux liés à des régimes amaigrissants sont normaux. Par conséquent, tant les cliniciens que les proches du patient doivent toujours savoir distinguer les changements de comportements normaux de ceux qui ne le sont pas.
Toutefois, vous ne devez pas faire la police et traquer les vomissements d’un proche atteint d’un trouble de l’alimentation. Exprimez votre préoccupation, offrez de l’aide, de l’information, et communiquez avec nous si vous le souhaitez. Nous disposons de documents, d’articles et autres lectures utiles aux personnes atteintes de troubles de l’alimentation qui peuvent les aider à envisager le fait qu’ils ont un problème et éventuellement à se faire aider à cet égard. Mais à moins que vous ne le fassiez, ils ne le feront probablement pas.
-Howard Steiger, Ph. D., École Mini Psy 2009
Est-il possible d’être à la fois anorexique et boulimique?
Les critères de diagnostics sont très déroutants; c’est donc une bonne question. Selon ces critères, on souffre soit d’anorexie mentale soit de boulimie. Comme je l’ai dit plus tôt, la boulimie touche sans distinction les personnes de poids normal et élevé, mais pas celles qui ont une insuffisance pondérale. Cela est d’autant plus perturbant qu’il y a deux types d’anorexiques: celles qui mangent beaucoup et se purgent et celles qui ne mangent pas. Généralement ce qui se passe c'est que les personnes commencent à se priver et bon nombre d’entre elles finissent par déréguler leur appétit. Elles étaient des personnes qui restreignaient leur alimentation et deviennent des personnes anorexiques hyperphages qui se purgent. Puis, à cause de ce processus, elles atteignent parfois un poids normal mais deviennent boulimiques.
Les gens ont tendance à passer de la restriction alimentaire à l’hyperphagie suivie de purgations. De nouveaux critères de diagnostic seront établis en 2011 pour inclure les personnes qui restreignent mais qui ne sont pas hyperphages et ne se purgent pas (qu’elles soient minces ou non), celles qui sont hyperphages et se purgent (quel que soit leur poids), et enfin, celles qui souffrent de troubles d’hyperphagie boulimique. Pour répondre plus directement à la question, oui, il est possible d’avoir à la fois un comportement anorexique et de souffrir de troubles d’hyperphagie boulimique. Cela est en fait très courant.
-Howard Steiger, Ph. D., École Mini Psy 2009
J’adore manger, mais je suis très consciente de l’importance de rester en forme. Je fais donc beaucoup d’exercice. Est-ce un problème?
Comprenez-moi bien: il n’y a rien de mal à faire de l’exercice ou au fait de manger. Ce sont des comportements sains et normaux. Mais il ne faut pas dépasser certaines limites, ce qui est la tendance de notre société. Il existe une idée répandue selon laquelle l’exercice est la solution au fait de manger. Par exemple, lorsque vous faites de l’exercice, les besoins caloriques de votre corps augmentent. Ainsi, à moins d’adopter le point de vue suivant : «J’ai fait beaucoup d’exercice aujourd’hui, alors je ferais mieux de manger beaucoup pour satisfaire mes besoins nutritionnels», vous provoquez une disparité incroyable entre votre niveau d’activité physique et la quantité de nourriture que vous avez absorbé. Devinez ce qui se produit si vous suivez ce rythme pendant une période suffisamment longue? Vous basculez dans l’hyperphagie. Par conséquent, en dépit de tous les encouragements de nos parents à faire de l’exercice, ils nous rappellent également de faire les choses avec modération.
-Howard Steiger, Ph. D., École Mini Psy 2009
Comment reconnaître qu'une personne est atteinte d'un trouble de alimentation?
Chaque individu réagit différemment. On peut toutefois s'inquiéter lorsqu'une personne démontre une relation anormale avec la nourriture, lorsqu'elle perd du poids, devient anxieuse, dépressive, introvertie et fuyante.
L'anorexie peut-elle être en partie causée par les gènes?
L'anorexie peut être en partie déterminée par les gènes. Une étude auprès de 31 000 jumeaux suédois a démontré que 56% du risque de développer un trouble de l'alimentation provenait du bagage génétique à la naissance. Une zone sur le chromosome 1 pourrait differencier les personnes anorexiques des personnes non atteintes. La perturbation de ce gène serait aussi liée à un type de personnalité caracterisé par des tendances compulsives ou anxieuses. Ces personnes réagissent souvent sous le coup de l'émotion et sont plus à risque de souffrir d'une dépression.
Une personne impulsive est-elle plus à risque de souffrir de boulimie?
Oui. Il y a dans ce trait de personnalité un fondement biologique puisque l’impulsivité est liée à des altérations dans le fonctionnement de la sérotonine, un neurotransmetteur du cerveau. Ces altérations rendent non seulement une personne plus encline à l’impulsivité, mais aussi aux fluctuations de l’humeur et aux problèmes de satiété—donc, aux épisodes boulimiques. Les personnes impulsives sont donc plus susceptibles de devenir boulimique mais cette caractéristique n’est pas liée directement à la maladie.
Les personnes obsédées par le fait de manger sainement souffrent-elles d'un trouble de l’alimentation?
On utilise désormais un nouveau terme à cet égard : « l’orthorexie ». Cela signifie être complètement obsédé par l’apport nutritionnel ou par les ingrédients bénéfiques de la nourriture, la quantité de vitamines qu’elle contient, par ce qui la compose, etc. Cela devient une véritable obsession, ce qui prouve que les gens peuvent être obsédés par presque n’importe quoi. Surtout dans une société qui nous conscientise par rapport à ce que nous mangeons. Je ne dirais pas que les gens qui se préoccupent de ces choses-là souffrent d’un trouble de l’alimentation. Je dirais qu’il y a un problème lorsqu’une personne est si préoccupée par son poids, son alimentation et son image corporelle que cela occupe beaucoup de place dans sa vie, et commence à avoir des répercussions telles sur son comportement que cela commence à lui nuire. Les personnes qui sont atteintes d'orthorexie sont parfois incapables de manger. Elles sont si effrayées de manger quelque chose qui ne soit pas sain qu’elles en deviennent émaciées. Il ne reste plus rien sur leur liste d’aliments «sans danger».
-Howard Steiger, Ph. D., École Mini Psy 2009
Peut-on mourir d'un trouble de l'alimentation?
L'anorexie est associée au taux de mortalité le plus élevé parmi les troubles de santé mentale. Les troubles de l'alimentation deviennent souvent chroniques et ont des conséquences médicales et psychologiques néfastes. Selon l'Institut national de la nutrition, 10 à 15 % des personnes atteintes d'anorexie ou de boulimie en meurent.
Est-ce qu'un corps en forme de poire est idéal pour la santé des femmes?
Oui, la forme du corps féminin en poire est idéale pour la santé, pourtant la plupart des femmes tentent de l'éviter. Il est important de savoir que la minceur n'est pas plus saine que l'embonpoint et les variations de poids sont plus dommageables pour la santé que l'embonpoint.
L'anorexie et la boulimie sont-ils des troubles sérieux ou une lubie de jeune fille qui veut ressembler aux mannequins?
L'anorexie et la boulimie sont des troubles de l'alimentation. Il s'agit de maladies mentales complexes qui peuvent être traitées. En outre, ces maladies affectent également les hommes et l'âge moyen des personnes atteintes est de 28 ans.
Pourquoi les adolescents sont-ils les plus à risque, surtout les jeunes adolescentes?
L’adolescence occasionne beaucoup de changements à plusieurs niveaux. Il est évident que l’adolescence s’accompagne de changements de poids et de forme corporelle. Vous développez des attributs féminins, des courbes. C’est aussi un temps d’instabilité émotionnelle. Les hormones prennent le dessus. C’est un temps où vous devez former votre propre identité, et un temps où la pression exercée par les pairs est très importante. Ce que pensent vos amis est beaucoup plus important que ce que pense votre mère. Il y a une pression de se conformer, de bien paraître, d’être socialement et sexuellement désirable. Encore une fois, si cela donne prise à l’idéal de la minceur, qui veut dire « voilà à quoi je dois ressembler et ce n’est pas le cas », l’impact sera très négatif et les filles seront beaucoup plus vulnérables aux pressions de changer leur apparence et de se conformer.
-Mimi Israël, M.D., FRCP, École Mini Psy 2013