17-05-2010


 La stimulation magnétique transcrânienne (SMT) sonne davantage comme une application de science-fiction que comme un traitement médical. Mais la SMT est la dernière nouveauté à l’Institut universitaire en santé mentale Douglas dans le traitement de la dépression.

Marcelo Berlim, psychiatre au Douglas et professeur adjoint à l’Université McGill, est un jeune homme doté d'une mission : comprendre le plus possible le mécanisme d’action de la SMT, ainsi que son plein potentiel en matière de soins cliniques aux patients souffrant de dépression. Le Dr Berlim dirige ce nouveau traitement, qui est arrivé au Douglas au milieu de 2008. Il est responsable de l’élaboration de protocoles de recherche, de la supervision des techniciens qui administrent ce traitement, et de l’évaluation des patients qui lui sont adressés.

Comment ça fonctionne . . . et pourquoi?

Selon le Dr Berlim, la SMT, qui a été utilisée pour la première fois dans le traitement de la dépression clinique en 1995 aux États-Unis, ne nécessite qu’un appareil très simple. « Il comporte un condensateur, ce qui signifie qu’un dispositif, à l’intérieur, emmagasine l’électricité, explique-t-il. Puis, une bobine métallique en huit libère l’énergie emmagasinée en impulsions très brèves et rapides dans certaines régions du crâne du patient. »

Les professionnels sélectionnent alors des paramètres, comme le nombre d’impulsions, leur intensité et l’intervalle entre les impulsions. Ces paramètres sont déterminés en fonction des lignes directrices actuelles en matière de sécurité.

Pourquoi cela fonctionne-t-il ? « Eh bien, on ne comprend pas encore complètement le processus, dit le Dr Berlim. Mais, ce qu’on sait, c’est que ces impulsions électromagnétiques peuvent produire des courants électriques dans le cerveau; c’est un organe électrique qui communique grandement au moyen d’impulsions électriques. C’est pourquoi nous sommes en mesure de moduler l’activité des neurones en fonction des courants électriques. Nous étudions toujours la façon dont cela se produit.»

Depuis son arrivée, au milieu de 2008, l’appareil n’a été utilisé que dans le cadre d’une étude pilote sur la dépression. Il fallait apprendre à utiliser l’appareil, évaluer son utilité et étudier ses effets secondaires. «Nous voulions vraiment pouvoir en faire l’essai avant d’en faire profiter la collectivité», précise le Dr Berlim.

Pour qui est-ce indiqué ?

En général, la SMT est indiquée pour les patients qui souffrent de dépression majeure courante, et qui ont essayé, sans succès, au moins deux antidépresseurs, ou pour les patients qui ont une intolérance aux médicaments prescrits pour la dépression.

«Mais ce n’est pas un traitement pour tout le monde, précise le Dr Berlim. Le taux d’amélioration se situe probablement autour de 30 % à 50 %. Et il faut jusqu’à quatre à six semaines de traitements quotidiens avant que les symptômes ne s’atténuent. Nous avons également constaté que lorsque la dépression est plus grave, le taux de réaction diminue habituellement.»

Chez certaines personnes, l’effet positif peut durer jusqu’à un an. Cependant, chez d’autres, un traitement de maintien à la SMT est nécessaire après seulement quelques mois. Ce traitement n’est pas aussi intensif, il s’agit d’une ou deux fois par semaine, mais il faut parfois le poursuivre indéfiniment.

«Quand nous serons enfin prêts à offrir la SMT comme traitement à la collectivité, nous demanderons aux patients d’être référés par un médecin, précise le Dr Berlim. Cela signifie qu’ils devront obtenir une consultation médicale auprès d’un généraliste ou, idéalement, d’un psychiatre. Puis, je vais rencontrer le patient, évaluer son histoire clinique et confirmer le diagnostic de dépression majeure. Je vais ensuite évaluer les questions de sécurité par rapport à la SMT; il faut surtout que le patient n’ait pas d’antécédents d’épilepsie ou de convulsions.»

Avantages et effets secondaires

Selon le Dr Berlim, le traitement est très sûr. «Le pire effet secondaire qui peut survenir, et cela s’est déjà produit dans le passé, avant la mise en place des lignes directrices sur la sécurité, en 1998, ce sont les convulsions, explique-t-il. Les patients disent qu’à chaque impulsion magnétique, ils sentent un « clic » dans leur tête, mais qu’après quelques jours, ils s’y habituent. Cela peut également faire contracter les muscles de la tête, alors chez les patients qui ont des antécédents de céphalées de tension, cela pourrait provoquer des maux de tête, qui peuvent être soulagés avec de l’ibuprofène ou de l’aspirine.»

La SMT fait aussi l’objet d’essais dans le traitement de différentes maladies neurologiques et psychiatriques, comme la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer, les troubles anxieux (ex., le trouble obsessif-compulsif, le trouble de stress post-traumatique et le trouble anxieux généralisé), la schizophrénie et les troubles alimentaires. Ce sont là des domaines de recherche beaucoup plus récents, mais le Dr Berlim prévoit être en mesure d’offrir la SMT pour certains de ces troubles cliniques dans un avenir rapproché.

Cependant, la FDA n’a encore approuvé l’utilisation de la SMT que dans les cas de dépression majeure.

Lorsque le nouveau Centre d’imagerie cérébrale Douglas sera prêt (il devrait être terminé au début de 2011), une suite spéciale réservée à la SMT comportera deux ou trois appareils. On trouvera également au Centre diverses méthodes de recherche sur le cerveau, dont la neuroimagerie et l’électroencéphalographie, qui se complètent dans l’amélioration des soins donnés aux patients et des résultats obtenus.

À l’heure actuelle, l’Institut Douglas est le seul établissement de soins de santé du Québec qui utilise la SMT spécifiquement pour traiter les troubles psychiatriques.