Il y a quatre fois plus de personnes souffrant d'un trouble mental en prison que dans la population en général. Pourquoi ?

  • Elles sont pauvres et commettent un grand nombre de délits de survie liés à la pauvreté
  • Les personnes qui souffrent d'un trouble mental sont plus nombreuses qu'avant dans la collectivité et le public les tolère moins. Plusieurs personnes décideront d'appeler la police si elles voient quelqu'un se parler à lui-même, crier ou afficher un comportement étrange
  • Pour le même délit mineur, les personnes souffrant d'un trouble mental sont plus susceptibles de se faire arrêter ou accuser que des personnes sans trouble mental
  • Les personnes ayant un trouble mental sévère sont plus susceptibles d'avoir des problèmes d'alcool ou de drogue et la toxicomanie est un facteur de risque important de criminalité et de violence dans l'ensemble de la population

Qui sont ces personnes judiciarisées ?


Le portrait de la santé mentale en milieu judiciaire est multiple et varié. On compte ainsi:

  • une majorité de personnes qui commettent des délits mineurs et qui n'auraient pas été arrêtées si elles n'avaient pas eu un trouble de santé mentale
  • ceux qui commettent des délits de survie liés à la pauvreté, par exemple, manger dans un restaurant sans payer ou voler un article dans un magasin
  • ceux qui commettent des délits liés à leur problème d'alcool ou de drogue, problème plus fréquent chez les personnes attieint d'un trouble mental
  • un certain nombre qui ont un trouble de la personnalité et qui ont commis plusieurs délits, en particulier des actes de violence envers autrui
  • un faible pourcentage dont les symptômes (délires, hallucinations, etc.) les poussent à des comportements violents

La Commission d'examen des troubles mentaux du Québec (CETM)

La Commission d'examen des troubles mentaux (CETM) du Québec – ou Review Board dans les autres provinces canadiennes – est un tribunal administratif créé en 1992 en vertu du Code criminel. La CETM rend des décisions concernant les personnes qui font l'objet soit d'une décision d'inaptitude à subir leur procès, soit d'un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Tant que l'accusé n'est pas libéré inconditionnellement ou jugé apte à subir son procès, une révision doit être tenue chaque année. La CETM siège toujours en formation d'au moins trois membres dont un avocat et un psychiatre.

Pour subir son procès, un accusé doit être apte

Si une personne a commis un délit relevant du Code criminel et qu'elle souffre d'un problème de santé mentale, il se peut que la question de son aptitude à subir son procès soit soulevée. L'aptitude à subir son procès réfère à l'état mental de l'accusé au moment du déroulement des procédures judiciaires.

Une personne est inapte à subir son procès si, à cause d'un trouble mental, elle ne comprend pas la nature et l'objet des poursuites, les conséquences éventuelles des poursuites ou si elle n'est pas en mesure de communiquer avec son avocat. (Article 2, Code criminel canadien).

Au Canada, le juge émet une ordonnance d'évaluation pour qu'un professionnel de la santé mentale, la plupart du temps un psychiatre, évalue l'aptitude d'une personne à subir son procès et soumette son rapport à la Cour.

Si une personne est trouvée apte à suivre son procès, son procès peut débuter.

Si une personne est trouvée inapte à subir son procès, on suspend les procédures judiciaires. La Commission d'examen des troubles mentaux (CETM) transfère alors la personne vers une institution psychiatrique, souvent à l'Institut Pinel si elle a commis un délit grave. Si elle accepte, la personne peut recevoir des traitements. Elle se présente alors devant la CETM qui détermine son aptitude.

Lorsque l'accusé est de nouveau apte à subir son procès, la CETM le renvoie devant le tribunal régulier, tout en précisant les mesures à prendre pour assurer le maintien de son aptitude et la protection du public.

Si l'accusé reste toujours inapte, la CETM rend des décisions portant sur sa détention en établissement ou sur sa libération. Elle peut aussi recommander la suspension des procédures contre l'accusé, dans le cas où il est clair qu'il ne pourra jamais être apte (à cause d'un retard mental, par exemple) et qu'il ne représente pas un danger pour la société.

Il n'existe aucun chiffre récent sur le nombre exact de personnes qui reçoivent chaque année une ordonnance d'évaluation d'aptitude à subir leur procès. On estime ce nombre à 5 000 au Canada.

La responsabilité criminelle d'un accusé atteint d'un trouble mental

La responsabilité criminelle réfère à l'état mental de l'accusé au moment où il a commis son délit.

La responsabilité criminelle d'une personne n'est pas engagée si cette personne était atteinte de troubles mentaux qui la rendaient incapable de juger de la nature et de la qualité de l'acte criminel ou de comprendre que l'acte était mauvais au moment où il a été commis. (Article 16, Code criminel canadien).

Le fait de souffrir d'un trouble mental n'exempte pas automatiquement une personne de sa responsabilité criminelle. Un examen judiciaire et psychiatrique strict le déterminera. Son verdict sera alors : coupable, non-coupable ou non-criminellement responsable pour cause de troubles mentaux.

Si une personne obtient un verdict de non-responsabilité criminelle, elle ne sera pas acquittée ou libérée sur-le-champ. La CETM devra d'abord évaluer le risque que cette personne représente pour la sécurité du public. Les audiences se tiennent dans l'établissement où l'accusé est detenu ou soigné. Si la CETM estime que la personne pose un risque pour la société, elle sera maintenue en détention dans un hôpital désigné par la CETM. Sinon, la personne doit être libérée, avec ou sans conditions.

Quelques statistiques sur la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux :

  • Au Québec, entre 350 et 400 personnes sont déclarées non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux chaque année
  • La majorité d'entre elles ont un diagnostic du spectre de la schizophrénie
  • Près de 85 % sont des hommes
  • L'âge moyen est de 36 ans
  • Une personne sur trois vit à Montréal et la moitié dans la région de Montréal
  • La moitié d'entre elles n'avaient pas d'antécédents criminels

 

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